Likinga « Redo » au panthéon du Clan Zaïko

Le Phare n°4646 du mercredi 28 Août 2013

Inhumé hier à la nécropole Entre le Ciel et Terre

Likinga « Redo » au panthéon du Clan Zaïko

Vibrant hommage rendu à « Redo » Jean Likinga par sa famille, ses amis et ses collègues artistes-muciens, hier mardi 27 août au funérarium de l’Assanef à Lingwala. A cette cérémonie mortuaire, se sont joints des acteurs politiques, des opérateurs économiques et une foule d’anonymes qui ont assisté aux obsèques du chanteur depuis la levée de son corps de la morgue de la Clinique Ngaliema, le lundi 26 août 2013, jusqu’à son enterrement hier à la nécropole Entre Ciel et Terre dans la Commune de la N’Sele. Le dénominateur commun de tous les témoignages rendus à cet effet : un talent remarquable, doublé de l’amour mémorable du prochain.

En effet, la longue liste des personnalités ayant tenu à déposer des gerbes de fleurs hier devant le cercueil a confirmé l’attachement et la considération voués à l’intéressé. Dans le lot de ceux qui ont défilé, on a noté la présence du gouverneur de la ville de Kinshasa, André Kimbuta Yango ; du directeur de cabinet du ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Culture, Manda Tchebwa Tcha Malu ; du représentant du secteur de Busu Djano ; des députés et sénateurs de Bongandanga ; des membres des groupes et associations comme Ndonge Lisanga, Bana Kin, Bana Barumbu, Bana Lisala, etc. ; du président du Conseil d’administration de la Société congolaise des droits d’auteurs( Socoda), Jacques Mondonga ; du directeur de cabinet du président de l’UDPS, Albert Moleka ; de ses collègues artistes des orchestres Zaïko Langa Langa, Empire Fondation ; etc.

Chapeau l’artiste !

Avant d’accorder la tribune aux proches du défunt pour les témoignages, une oraison funèbre a été dite par le révérend pasteur docteur Ngalasi Aggrey de l’église la Louange. Ce dernier a, d’entrée de jeu, tenu à préciser à l’assistance qu’il a eu l’honneur d’assumer cette responsabilité grâce à ses amitiés avec un frère du regretté André Bimi Ombale, lui aussi ancien de Zaïko et ami de Jean Likinga. Cependant, l’homme de Dieu a affirmé avoir rencontré personnellement Jean Likinga lorsqu’il devait prier pour lui à propos des maux de tête atroces qui le tourmentaient, il y a trois ou quatre ans.

Invitant, dans sa prêche, l’assistance à se préparer tous les jours par Grand jour car la résurrection sera le partage de ceux qui ont cru, le pasteur a conclu son sermon par une prière solennelle en faveur des orphelins Likinga.

Au chapitre des témoignages, le représentant des natifs de Barumbu, Aimé Fele, a ouvert le bal en se remémorant une nuit de noël durant laquelle Likinga Redo fredonnait la douce mélodie d’une chanson mythique. « On croyait que les anges du ciel en personnes chantaient. Comme une traînée de poudre, la nouvelle se répandit jusqu’aux Malou et Sensationnel, deux orchestres des jeunes du quartier. Puis, il fut rattrapé par Empire Bakuba, un groupe né, ironie du sort, sur avenue Croix Rouge A 16, la parcelle familiale des Likinga. Rebelle, il est allé quelques années seulement après dans Zaïko, laissant Pépé Kallé et compagnie… » a-t-il raconté.

Homme célèbre, gentil et simple, Likinga Redo entre, d’après Aimé Fele, dans le panthéon des « saints et des anges ». « Dieu lui-même lui a ordonné d’aller chanter avec Wendo, Pépé Kallé et Kallé Jeef Kabasele au sein de l’orchestre ‘Bana Barumbu Stars. Nous nous séparons, mais sache que nous t’aimons. Chapeau l’artiste ! », a lancé cet amoureux de la Commune de Barumbu.

Après lui, un autre ancien de Barumbu et leader de l’Empire Bakuba, José Dilu Dilumona, a pris la parole en révélant que lui et ses collègues pleurèrent la 1ère fois que Likinga chanta. « Depuis lors, j’avais décidé de le laisser chanter mes compositions. Nous avions besoin d’une telle voix pour seconder Papy Tex…Il a été remarquable dans Motesse, Mankenda, Vava, Kombe Dilu, etc. » a relever l’artiste, soulignant tout de même que la chanson « Elo » interpertée par Likinga dans Zaïko a été explosive.

Disciple d’Orphée de talent dont la renommée avait traversée les frontières nationales, un autre témoignage est venu d’un Brazzavillois, Baudouin Ondongo, qui a revélé avoir connu Likinga en 1972 lors de son premier séjour dans la capitale d’en face. « Il m’invita peu après à Kinshasa, puis me montra l’ABC de la musique. Il est mon modèle… » a-t-il conclu.

Quant au député national Jean-Claude Vuemba, il a souligné que le trait de caractère qui l’a le plus marqué est son amour du prochain. « Je me souviens d’une altercation entre Jossart Nyoka et Mbuta Mashakado. C’est lui, Likinga, qui a déployé toutes les énergies pour reconcilier ces deux acteurs majeurs de Zaïko. Ce garçon savait réunifier… », a clamé l’élu de Kasangulu.

Admirable parcours   

C’est le jeudi 8 août 2013 tard dans la nuit que la nouvelle de sa disparition en France est tombée, renvoyant ainsi la star rejoindre ses amis Mbuta Mashakado, Lengi Lenga dit « Ya Lengos », Bimi Ombale, Teddy Sukami, Enoch Zamuangana, Matima, Dyndo Yogo, etc. au Panthéon des immortels du Clan Zaïko.

Mort à 59 ans de suite d’une longue maladie, il fit ses débuts dans l’art d’Orphée en 1968 au sein de l’orchestre « Les Malou » dans la commune de Kinshasa, puis un autre « Sensationnel » aux côtés de Doris Ebuya qui tenait altièrement la guitare solo, Gerry Dialungana à la guitare basse, Ndundu Alhadji à la guitare d’accompagnement, les chanteurs Diavolo et Lovi( Longomba Victor, fils du chanteur du même nom), etc.

A partir de 1971, Likinga marqua une discrète présence dans l’orchestre « Empire Bakuba », renforçant ainsi la section « chant » du trio KADIMA (Kabasele Yampanya dit Pépé Kallé, Dilu Dilumona et Matolu Dode dit Papy Tex). Trois années plus tard, en 1974, le chanteur choisit d’entrer dans l’ensemble Zaïko Langa Langa dont la cote se trouvait, alors, au Zénith. Il se révèle un feu follet de la chanson et compose « Kamanzi ». Ce fut, tout de suite, le triomphe.

Son modus cantandi, se doublant d’un timbre vocal sui generis, se singularisait dorénavant dans la ligne « chant » de l’orchestre Zaïko et apporta une sensibilité considérable au sein de cette grande formation. De « Yudasi » à « Obi », en passant par « Kamango » et une foultitude d’œuvres à grand retentissement, Likinga Mangenza a prouvé à suffisance ses qualités d’interprètes hors pair.

Son style a engendré une certaine mode et incité d’autres chanteurs à faire de même au sein de leurs groupes respectifs. Dans le lot de ses nombreux émules, il y a notamment Lukombo Djeffard, Yenga Yenga Junior, Carlito, JP Buse, Malage de Lugendo, etc.

Son départ de Zaïko Langa Langa ayant créé un vide énorme, le recrutement de JP Buse Mosongela, en 1982, ne poursuivait qu’un objectif : combler cette vacance en obligeant la nouvelle recrue à chanter, coûte que coûte, dans le même registre que Likinga. Le nouveau musicien, en tout cas, s’en acquitta admirablement.

A la suite d’une sordide histoire qui lui valut un séjour carcéral au Portugal, en 1988, Likinga Mangenza réapparu sur la scène musicale dans l’orchestre dans l’orchestre «Zaïko Langa Langa/Familia Dei», miné par des conflits de leadership.

Il se décida ainsi de repartir pour l’Europe, où il évolua, désormais, en qualité de musicien indépendant jusqu’à ce que la mort l’emporte à la suite de maladie.

 

Tshieke Bukasa et Thabita Katende (Stg/UPN)

 



28/08/2013
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