Tribune libre : A HAUTE VOIX, L’Opposition face à la sauvegarde de la Constitution : Où nous amène le dialogue ?

Tribune libre : A HAUTE VOIX

L’Opposition face à la sauvegarde de la Constitution : Où nous amène le dialogue ?

Les écrivains raconteront sûrement un jour l’histoire de l’Opposition politique congolaise. Et, ce ne sont pas les points de départ qui vont manquer.

On peut, par exemple, prendre comme point de départ la visite au début du mois de Mai dernier de Monsieur Kalev, responsable de l’Agence Nationale de Renseignements, ANR,  essentiellement auprès des dirigeants de l’UDPS, du MLC, de l’UNC ainsi que de certains acteurs politiques de l’Opposition et l’impact de cette visite sur le cours actuel des évènements. D’autres leaders de l’opposition, comme le signataire de cette tribune, avaient carrément refusé de se prêter à ce jeu avec un fonctionnaire de l’Etat, supposé être apolitique.

Aujourd’hui, de tous ceux qui avaient été approchés par Monsieur Kalev, émissaire de Monsieur Kabila, apparemment l’UDPS, seule, a ouvertement poursuivi les contacts avec la mouvance Kabiliste à Kinshasa, à Bruxelles, en Italie et en Espagne.  L’UDPS partage donc  l’actualité avec la « majorité » Kabiliste, autour d’un projet de dialogue et, au-delà de tout discours sur le respect des délais constitutionnels, le schéma poursuivi s’inscrit en dehors de l’ordre constitutionnel. Les deux parties cherchent fondamentalement comment formaliser ce dialogue afin d’aboutir à un accord. Sera-t-il un « accord des cascades », nouvelle formule, ou un « accord des glissades » ?

On le saura très vite, mais en attendant, il y a un besoin urgent de clarification pour nous sortir tous de la grande confusion dans laquelle on veut nous enfermer.

  1. DE LA PETITE GENESE

Au mois d’août 2011 à Fatima, les partis politiques, les regroupements politiques de l’opposition ainsi que certaines organisations de la société civile étaient réunis à la grande salle de Fatima et, par une simple motion du signataire de cette tribune, le Président Etienne Tshisekedi fut désigné Candidat commun de l’opposition. Pour dire clairement, le seul et unique candidat qui remplissait les critères arrêtés en ce temps !

Cette question avait divisé l’opposition et elle s’était éclatée en deux : un autre groupe s’était retiré à l’Hôtel Sultani et avait présenté 4 candidats à la présidence de la République. Passons !

Après la publication des résultats par la CENI de Ngoyi Mulunda, Monsieur Kabila avait vite prêté serment. Le Président Tshisekedi, de son côté, avait lui-aussi fait la même chose. De plein pied, le pays était entré dans une crise de légitimité.

Quand les leaders politiques, élus députés nationaux, qui avaient soutenu sa candidature à la présidentielle, parmi lesquels votre serviteur, sont allés le voir au sujet de leur participation aux travaux de l’Assemblée Nationale, le Président Tshisekedi, en démocrate, leur avait rappelé qu’ils étaient responsables des partis politiques et qu’ils devraient s’en référer aux structures de leurs partis politiques respectifs pour décision ; le Président Tshisekedi ne pouvant se prononcer que pour l’UDPS.

C’est ainsi que, lors de son point de presse du 20 Janvier 2012, le Président Tshisekedi  va non seulement interdire aux élus de l’UDPS de siéger à l’Assemblée nationale, mais il va aussi annoncer la « dissolution » de l’Assemblée nationale, ne reconnaissant que son élection à la Présidence.

Comment devrait-on sortir maintenant de cette crise ?

Il est utile de rappeler également qu’en Décembre 2011, aussitôt après la publication des résultats de la présidentielle, le Président Tshisekedi avait demandé à la Communauté Internationale d’aider la RDC à trouver une solution à cette crise.

Mais, les commentaires du Président Tshisekedi, faits en dehors du texte de son point de presse du 20 Janvier 2012, avaient radicalement changé l’approche d’une solution négociée lorsqu’il avait demandé que l’on puisse lui « emmener Monsieur Kabila, ligoté » !

Le Président Tshisekedi et l’UDPS venaient désormais de rentrer dans la logique de l’IMPERIUM.

Malheureusement, la longue et silencieuse poursuite de ce projet avait placé le Président Tshisekedi et l’UDPS dans une sorte d’hibernation, si bien que de 2012 à 2014, ils sont restés loin du combat pour le dialogue mené par l’opposition en vue de résoudre la crise de légitimité née du chaos électoral de Novembre 2011.

Devant l’indifférence manifeste de la mouvance Kabiliste d’engager un dialogue franc avec l’opposition, c’est à la fin de l’année 2014 que la plupart des alliés de l’UDPS et tous les autres partis qui s’investissaient pour la tenue d’un dialogue avaient décidé de tourner définitivement le dos à l’exigence du dialogue en levant le pied sur sa pédale au profit de la tenue des élections crédibles en 2016.

Ainsi, quand l’opposition congolaise, les yeux désormais tournés vers les élections, avait mobilisé le peuple dans la semaine du 19 au 25 Janvier 2015 contre la loi électorale, l’UDPS avait choisi d’être aux abonnés absents.

Certaines personnes pourraient spéculer sur le timing choisi, mais c’est juste un mois après ces évènements, soit le 14 Février 2015, que l’UDPS finalement  avait décidé de revenir au dialogue pour résoudre la crise, abandonnant le projet de l’IMPERIUM pour lequel d’ailleurs Eugène DIOMI NDONGALA est fondamentalement en prison.

Entretemps, pour les alliés de l’UDPS, à un an de la fin du deuxième mandat de fait de Monsieur Kabila, le dialogue n’était plus opportun. Il était désormais dépassé.

L’UDPS transmettra alors à la Monusco et à la majorité Kabiliste sa « feuille de route pour la sortie de crise » en RDC.

  1. DE LA FEUILLE DE ROUTE

Avec le background ci-dessus en tête, examinons maintenant trois aspects seulement de cette feuille de route en faveur du dialogue politique comme mode de règlement rapide et satisfaisant de la crise politique en RDC :

  1. Résolution du contentieux électoral de 2011 (cause essentielle de la crise en RDC) ;
  2. Restructuration de la CENI ;
  3. Désignation de manière consensuelle des membres de la Cour Constitutionnelle.

Avant de faire quelques observations sur ces aspects, une précision de taille nous semble importante.

Il est quand même curieux et même choquant de constater que l’UDPS se soit appropriée de la question de la crise de légitimité au point de donner l’impression qu’elle en a le monopole alors que tous ceux qui avaient voté pour le Président Etienne Tshisekedi ne sont pas tous membres de l’UDPS.

Et ceci est d’autant plus vrai que l’élection du Président de la République est une rencontre entre un Homme (non pas un parti) et son peuple. C’est pour cela que la circonscription électorale du Président de la République est l’ensemble du territoire national.

Maintenant que l’UDPS s’en approprie au point d’engager des discussions avec la mouvance Kabiliste sans associer tous ceux qui avaient désigné, soutenu (avec leurs moyens de bord, il faut le dire)  et voté pour le Président Tshisekedi en 2011, cela peut être perçu comme une usurpation d’une entreprise collective.

Ainsi, s’agissant de :

1. La Résolution du contentieux électoral de 2011

Pour l’UDPS, le dialogue doit se tenir suivant l’accord-cadre d’Addis-Abeba ainsi que la Résolution 2098 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies.

Le signataire de cette tribune observe ce qui suit :

  1. L’accord-cadre d’Addis-Abeba ne mentionne nulle part la problématique du dialogue ;
  2. Il est illusoire de penser que lors de ce dialogue il sera question pour Monsieur Kabila de quitter le pouvoir au profit du Président Tshisekedi ;
  3. L’accord- cadre d’Addis-Abeba a été signé par Monsieur Kabila qui avait engagé le pays en qualité de Président de la République. La question que l’on est en droit de se poser est celle-ci : En s’appuyant sur cet accord-cadre, signé par Monsieur Kabila, « Président de la République », l’UDPS n’a-t-elle pas déjà vidé implicitement le contentieux électoral de 2011 ?

2. La Restructuration de la CENI

Pour l’UDPS, la CENI doit avoir une Présidence « collégiale » (2 présidents représentants chaque camp : UDPS et Majorité Kabiliste).

Fort de l’observation faite au point B ci-dessus, l’on peut se demander en vertu de quoi l’UDPS, comme parti politique, peut être le seul interlocuteur de la « Majorité Kabiliste » quand on sait que ce n’est pas l’UDPS seule qui avait voté pour le Président Tshisekedi ?

Par ailleurs, la CENI est organisée par une loi organique votée à l’Assemblée Nationale que le Président Tshisekedi avait « dissoute » le 20 Janvier 2012. Comment l’UDPS entend-elle obtenir cette restructuration de la CENI en dehors de l’Assemblée Nationale ?

Question : Le Président Tshisekedi ne devrait-il pas commencer par « réhabiliter » l’Assemblée Nationale qu’il avait dissoute et en même temps réhabiliter à la fois ses « députés » considérés par l’UDPS comme des « rebelles » ainsi que le Groupe Parlementaire UDPS & Alliés ? Même si les contacts ont officieusement repris avec ces députés, membres du Groupe parlementaire « UDPS et alliés » à la même Assemblée ?

En effet, tout autre schéma, en dehors de l’Assemblée Nationale, à partir duquel l’UDPS pourrait obtenir cette restructuration serait inconstitutionnel !

Il en est également de la question de la désignation des membres de la Cour Constitutionnelle telle que proposée par l’UDPS.

CONCLUSION

A la lumière de la brève genèse, des observations faites et questionnements relevés ci-dessus, on peut aisément affirmer qu’au travers du projet de dialogue, l’UDPS ainsi que la « Majorité Kabiliste » s’inscrivent dans un schéma manifestement en dehors de la Constitution de la République. Un schéma que tous les démocrates ainsi que tous ceux qui sont attachés à l’ordre constitutionnel ne peuvent accepter. Un coup d’Etat qu’il faut combattre et on doit pouvoir le dire à haute voix !

En attendant, il nous revient de constater que le fameux « pré-accord » de gouvernement entre les deux parties vient de faire « flop » à Marbella, l’UDPS ayant claqué la porte en refusant la proposition fantaisiste des Kabilistes de lui offrir la « Vice-présidence », structure n’ayant aucun soubassement constitutionnel.

Comme pour dire que la vérité finit toujours par triompher et, si nécessaire, nous y reviendrons, avec force détails.

Entretemps, l’ordre constitutionnel doit être préservé et respecté par tous.

Fait à Kinshasa, le 13 Septembre 2015

Le Président National du MPCR

Jean Claude VUEMBA LUZAMBA

Député National



14/09/2015
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