A propos de l’élection présidentielle de 2016 : Le souverain primaire réclame le suffrage universel direct (Article 70 de la Constitution)
Libre opinion
A propos de l'élection présidentielle de 2016
Le souverain primaire réclame le suffrage universel direct (Article 70 de la Constitution)
Le sujet n'est plus tabou. Politiciens et médiateurs en ont fait leur menu quotidien. Le Chef de l'Etat, Monsieur Joseph KABILA sera fin mandat le 19 Décembre 2016. D'où vient que l'on nous parle de l'élection présidentielle au second degré en 2015 au sein du Congrès ? Cette proposition ne rencontre guère le point de vue du Souverain Primaire, de qui émane le pouvoir, qui réclame et insiste sur le suffrage universel direct pratiqué en 2006 et 2011. Les dinosaures ont donc la peau dure depuis l'époque Mobutienne jusqu'à l'heure Kabiliste. A qui profiterait l'instabilité politique inspirée malheureusement de la 4ème République française des années 1940 et 1950 alors que la Constitution de la RDC a été rédigée suivant le modèle de la 5ème République française en vigueur de 1958 à nos jours. Débat d'idées.
Curieusement, à 2 ans de ladite échéance, cruciale pour l'alternance démocratique ou l'alternance politique, le Chef de l'Etat garde un mutisme inquiétant sur cette question d'actualité majeure. Il devrait, à notre avis, se prononcer une fois pour toute, pour mettre les points sur les « i » et baliser l'avenir de la Nation mise en péril par les multiples groupes armés à l'Est et au Nord du pays. Respectera-t-il l'article 220 de la Constitution ? Sous la limitation du mandat présidentiel, en désignant un (e) dauphin (e) pour l'élection présidentielle prochaine, celle de tous les enjeux politiques et martiaux, ou sera-t-il tenté de modifier l'article 70 de la Constitution pour briguer un troisième mandat de 7 ans renouvelable une fois (2015 – 2022 ; 2022 – 2029) avec l'octroi d'un poste de Vice-président à l'opposition dite républicaine ou modérée. Bien entendu, le Premier Ministre sera toujours désigné par la Majorité Parlementaire suivant la loi fondamentale ad-hoc du 18 Février 2006.
Cette perspective qui circule sous le manteau de la Majorité présidentielle est à même de vider la Constitution de toute sa substance juridique en ouvrant ainsi la boite à Pandore pour un règne illimité du Souverain Pontife (Empereur, Sultan, Roi, etc.) régnant tel un Président à vie dans une Nation déchiquetée par des rébellions internes et externes.
Autrement dit, l'anarchie, le chaos et l'imbroglio des années 1960, 1990 et 2000 avant la signature de l'accord de paix de Sun City (RSA). Ce qui accréditerait la thèse suivant laquelle la RDC est un terrain d'expérimentation de la néo colonisation par les puissances mondiales et les multinationales désireuses de profiter à satiété de ses nombreuses ressources naturelles depuis 1945. Voilà la face cachée du projet de la balkanisation de l'ex. Zaïre !
L'opinion nationale et internationale est sidérée par les trompettes officielles des chantres du kabilisme dans les médias périphériques : l'homme du perchoir de la Chambre Basse parle du « Respect strict de la Constitution », le Porte-parole du Gouvernement affirme sans ambages que « le Président Joseph Kabila ne sera pas candidat en 2016 », et le Ministre de l'intérieur d'enchainer que « le Chef de l'Etat demeurera au pouvoir jusqu'à la remise et reprise avec le nouveau Président Elu… ». Des infirmations gratuites et péremptoires qui ne garantissent rien et jettent la poudre soporifiques aux yeux de la population congolaise, la véritable Majorité silencieuse du Congo profond prise en charge par la Diaspora sinon, comment comprendre que le Secrétaire National du PPRD Claude Mashala ait initié, pince sans rire une pétition incendiaire pour la modification de l'article 220 de la Constitution, du reste déjà modifié le 10 Janvier 2011, notamment avec la suppression du 2è tour de l'élection présidentielle en 2011. N'est ce point là une rupture du pacte républicain signé au pays de Nelson Mandela en 2003 ? La Constitution taillée sur mesure est donc le vade-mecum des dictateurs panafrique depuis les décennies. Il appartient aux leaders tous azimuts de l'Opposition radicale, centriste, modéré et de la société civile de sauver la République de la néo-dictature, la démocrature définie comme la pratique de la dictature dans un régime prétendument démocratique.
En fait, une prise en otage des Institutions républicaines par la Majorité dominante au détriment des forces politiques et sociales. L'appel du 15 Mars 2014.
C'est l'occasion indiquée pour nous d'interpeller les Elus du peuple congolais sur le péril de la Nation avec les turbulences du moment. Un large recul dans le temps permet seul de comprendre parfois la portée des éléments qui se déroulent sous nos yeux, même de ceux dont nous sommes les acteurs attentifs au 3è millénaire.
Mozart, pensait-il devenir le Maitre universel et incontestable de la musique ? Jean de la Fontaine soupçonnait il, dans la distraction légendaire de ses fables, qu'elles seraient des siècles plus tard apprises et récitées avec tant de ferveur ? Montesquieu savait il que « son esprit des lois » servirait de matrice à la Constitution de plusieurs pays de la planète terre au 2è siècle dernier et ce, jusqu'à nos jours ? « Gouverner c'est prévoir » dit-on. A vous donc de contrôler l'action des gouvernants au sein du Parlement, la maison par excellence de la démocratie et bastion du pouvoir législatif et vigilent. Donc critique. Gouverner, faut-il le rappeler est un art, sa pratique commande de distinguer l'important de ce qui est secondaire et de s'en tenir aux grandes lignes. Tous les arts ont leur règle et l'une des plus intangibles pour qui est appelé à faire la loi, est de donner l'exemple en respectant la légalité, c'est-à-dire, le respect des textes en vigueur dans la République renaissante.
Faut-il que nous vous rappelons, encore s'il le faut, que la bible, l'évangile, le coran, les plus grands livres de tous les siècles, sont sortis du désert. Ils ont été rédigés par des gens qui savaient à peine écrire, mais savaient penser et avec le temps de réfléchir. S'il faut donc réfléchir après eux, commençons par résoudre la crise de légitimité des Députés provinciaux, des Gouverneurs et des Sénateurs en organisant, au même moment, les élections locales municipales et provinciales au suffrage universel direct comme prévu en 2006. Et, ainsi de suite, au suffrage universel indirect avec les Gouverneurs, les Sénateurs avant le respect du cycle électoral législatif et présidentiel de 2016. La liquidation des arriérés législatifs est un impératif pour la mise en œuvre de la décentralisation et de l'effort du développement attendus depuis 2009 ou 2010. En dehors de ce processus légal, ce n'est ni plus ni moins que la déstabilisation annoncée de l'Etat néo-patrimonial du Congo.
Fait à Kinshasa, le 20 Mars 2014
TAKELE LUKOKI
Analyste Politique