Etienne Tshisekedi apanzi mouvement
Hon. JC Vuemba, Pdt Nat du MPCR
Gabin MUKE S "RT KAVKA"
Le Potentiel n°5157 du lundi 21 Février 2011
Etienne Tshisekedi apanzi mouvement
Etienne Tshisekedi a déclaré, lors de la célébration du 29ème anniversaire de l’UDPS, devant ses partisans, qu’il ne négociera avec personne quant à sa candidature à la présidence de la République. Cette mise au point s’adressait à ceux qui, se réclamant de l’opposition, ont estimé que le candidat unique de l’opposition devra être désigné à travers des primaires ou quelque chose de ce genre. Rappelons que depuis la manœuvre du pouvoir de ramener l’élection présidentielle à un tour unique, l’opposition s’est retrouvée le dos au mur, obligée de faire un front uni, au risque de voir Kabila rempiler pour cinq ans.
Mais quand on parle d’opposition, de quoi est-il question ? On y voit des gros poissons et des petits. Dans la catégorie des gros poissons, on citera le MLC, Vital Kamerhe, qui sont ou ont été dans les institutions, le premier comme le fer de lance de l’opposition institutionnelle, et le second comme ancien homme fort du pouvoir (aujourd’hui adversaire de Kabila.) Les petits, c’est la kyrielle de partis et regroupement et personnalités politiques, illustres et inconnus. Dans le lot : le RADER (prof Mampuya), l’EciDé (Martin Fayulu), l’USA (Union sacrée pour l’alternance, avec Christian Badibangi, Anzuluni ...), MPCR (Jean-Claude Vuemba). Tous ont un credo : Kabila doit partir.
Pour situer le contexte. Avant le retour d’Etienne Tshisekedi au pays après trois ans d’absence-maladie, le combat politique semblait plié, l’AMP sablant déjà même le champagne d’une victoire au premier tour, l’opposition peinant à se trouver un leader. Les quelques qui osaient s’afficher découvraient vite que la tâche de chausser les bottes d’Étienne était monstrueuse. Certains, par calcul politicien, ont entrepris de caresser le vieux lion dans le sens de la crinière afin d’obtenir son investiture en tant que dauphin, avant ... sa mort, car beaucoup le donnaient pour mort. JC Vuemba, Vital Kamerhe et le MLC sont de ceux-ci. On ne le leur reprochera pas, c’est de bonne politique, si l’on peut dire. Malheureusement, ou heureusement, le vieux lion est futé. Il écoutait et laissait prendre des photos dont les gens venaient faire commerce au pays, mais il n’a jamais passé le témoin à quiconque. Et contre toute attente, il est revenu, plus pugnace que jamais.
La foule qu’il y a eu à son arrivée était suspecte. L’on y a vu tout ce que Kinshasa compte de politiciens et de politicailleurs, actifs et retraités. Du coup, tout ce beau monde s’est mis à faire du bruit, de sa propre initiative, expliquant que l’opposition doit s’unir et présenter un candidat unique.
Connaissant le politicien de chez nous, ce zèle n’était pas désintéressé. Mieux, il était suspect. A notre avis, il s’agit d’une pagaille volontairement créée pour empêcher un jugement serein, et l’examen de la foule qui se bousculait derrière Tshisekedi. En effet, il y a là derrière, chacun comprendra de qui l’on parle, d’anciens détourneurs du dénier public, des gestionnaires politiques trempés dans tout ce qui a mis le pays à genoux, des opportunistes aussi bavards qu’incompétents, mais aussi, reconnaissons-le, quelques têtes bien en place. Cette marmaille de frères, si d’aventure elle arrivait à accompagner Tshisekedi jusqu’à une éventuelle victoire qui ne leur devrait rien, et pour cause, cette marmaille sera bien à la table pour réclamer des postes indus.
Aussi, je considère que la décision de Tshisekedi est une bonne sortie, pour secouer l’arbre et le débarrasser des mouches du coche. Avant de prétendre négocier avec un gros calibre, il faut commencer par prouver que l’on existe soi-même, ce qui est loin d’être le cas pour la plupart. Comme coup de semonce, c’est bien réussi. Maintenant que l’arbre est débarrassé des feuilles mortes, que reste-t-il ? Passons un peu en revue :
MLC. Voilà le futur grand perdant de l’affaire. Ce parti, qui doit son succès à son statut de groupe armé, à l’absence de l’UDPS aux élections de 2006 et à l’ambiance TSK du moment, n’a pas su justifier l’honneur qui lui est échu. Il n’a pas réussi à faire oublier Tshisekedi, pas plus qu’il n’a su mener des actions à succès au parlement, hormis quelques discours de convenance pour justifier le statut de premier parti de l’opposition au parlement. Il n’a jamais su ou osé suppléer à l’absence de JP Bemba et continue à croire naïvement que ce dernier pourra encore participer aux élections. Le MLC sait donc qu’une lourde sanction l’attend, mais, pour quand ? Les élections ce n’est pas pour demain. Peut-il prendre le risque de se déclarer sans candidat président pour soutenir Tshisekedi. Impossible, et à l’impossible nul n’est tenu. Tout comme l’AMP, parti au pouvoir, il faut continuer à boire le vin jusqu’à la lie, même s’ils savent à quoi s’en tenir.
Vital Kamerhe. Ce cher ami est un bon manœuvrier, mais cette fois-ci, la proie est trop grosse et risque de lui rester en travers de la gorge. Quitter l’AMP et Kabila était un exercice risqué. On ne quitte pas impunément la maffia, à moins qu’il ne s’agisse d’un jeu convenu pour tromper ceux d’en face. Kamerhe aura beau dire, on lui demandera toujours pourquoi il a écrit son fameux livre «Pourquoi j’ai choisi Kabila». Il espérait probablement réussir avec l’absence de Tshisekedi, or le vieux refuse de mourir. Kamerhe se transformer en lieutenant de Tshisekedi après avoir été celui de Kabila ? Difficile à imaginer, quand on sait l’ambition de l’homme. Mais aussi, dans le camp de l’opposition, il aura tort de croire qu’on lui fera de la place de bon coeur. Les «traitres» (transfuges) resteront des traitres dans les cœurs de beaucoup de gens, et les deux camps s’en méfieront toujours. Si l’on fait semblant de l’accepter, c’est pour affaiblir Kabila, en lui privant l’électorat de l’Est, mais ce n’est sûrement pas pour l’adhésion au kamerhisme. La situation de l’ancien speaker de la Chambre basse est donc des plus inconfortables. Les seconds rôles ne lui convenant pas, il faut s’attendre à ce qu’il maintienne sa candidature, une sorte de fuite en avant. Il s’est avancé trop loin pour reculer. Dans ce sens aussi, la sortie de Tshisekedi a été utile, pour clarifier la situation des uns et des autres.
DTP = (Dynamique Tshisekedi Président). C’est le groupe de petits partis qui ont décidé de soutenir la candidature de Tshisekedi à la présidence de la République sans exiger des primaires, sans conditions. A leur honneur, ils ont reconnu qu’ils n’avaient pas l’envergure de Tshisekedi pour s’opposer à Kabila. Aux dernières nouvelles, il s’agit d’un groupe de huit partis dont l’Ecidé (Fayulu) et le RADER (Mampuya). En dehors de ces deux, dont on notera quand même une activité régulière sur terrain (à Kinshasa) et des idées cohérentes, il y a quelques autres aussi inconnus que vous et moi. Mais, dans ce cas, pourquoi ne pas dissoudre tout simplement ces parti (cules) politiques dans l’UDPS, car, probablement, certains d’eux ont même moins de membres que la seule fédération de la Tshangu de l’UDPS ? C’est autant de gens qui vont réclamer des postes demain, tout simplement parce qu’ils sont président d’un parti politique (sur papier), alors qu’ils sont moins productifs, moins rentables qu’un chef de fédération dynamique.
USA-MPCR. L’Union sacrée pour l’Alternance et le MPCR ont le mérite d’avoir osé bouger pendant que Tshisekedi était absent. Nous ne serons pas méchants en disant qu’ils font la politique des salons, car on ne les voit pas beaucoup, ou pas du tout sur terrain. Dans ce cas, réclamer des primaires, ça rime à quoi ? Avec quels électeurs au primaire ? Nonsense.
Ceci dit, il est faux d’affirmer que la pluralité de candidats profite à Kabila. Ceux qui pensent qu’ils ont quelque chose à proposer devraient prendre leur courage et s’assumer, ou s’abstenir dans le cas contraire. En 2006, Kabila a eu 42 % au premier tour et JP Bemba environ 25 %, si mes souvenirs sont bons. Cinq ans plus tard, Kabila perd l’est, tandis que Tshisekedi était assuré de faire au moins aussi bien que Bemba. Le reste c’est question de battre campagne intelligemment, chacun pour son camp.
Ensuite, il n’est pas dit que le changement c’est le départ de Kabila, mais plutôt du kabilisme. A la limite, un Tshisekedi perdant à 48 % mais ayant gagné au parlement peut être plus fort qu’un Tshisekedi président exposé aux vicissitudes de la fonction. L’ennui c’est que l’homme est têtu et en fait une affaire personnelle, «un combat de toute une vie» pour reprendre ses propres mots.
Les élections auront lieu, au mieux, dans dix mois, et très probablement, dans plus de temps que ça. Ceux qui ont des idées ont le temps de les développer et cesser les combines politiciennes. Jusqu’à ce jour, il n’y a aucun parti qui a parlé de manière cohérence projet, programme, vision. C’est une grave lacune et il est temps de corriger. D’ici là, des surprises peuvent survenir d’on ne sait où. La Société civile n’a pas encore dit son dernier mot.
Mais, attention, la prise de position de Tshisekedi comporte un danger que Vincent Mubake, son conseiller politique, n’envisage probablement pas. Si les élections ne se tiennent pas à la date prévue, il est possible qu’on aille aux négociations, et dans ce cas de figure, l’UDPS n’a jamais été à l’aise. Ce sera l’occasion pour ceux disent ressentir du mépris, à tort ou à raison, dans les propos arrogants de Tshisekedi et Mubake, de se venger, comme après Sun City. J’eusse été conseillé de Tshisekedi, je lui aurais recommandé de savoir parler à la manière des «politiciens», c’.-à-d. ne jamais dire «non», ne jamais dire «oui», faire comprendre gentiment mais fermement. On ne sait jamais. On a décrié la vidéo de Lusanga, l’ancien compagnon fondateur de l’UDSP de Tshisekedi, mais on n’en a pas retiré les leçons. En écrasant les autres, on se crée une banque de rancune qui explosera tôt ou tard. Un homme averti en vaut deux.
Serge
Gontcho/Président de G1000