INTERVIEW DU PDT JC VUEMBA
Jean-Claude Vuemba : " Environ 80% des habitants de Kasangulu, mon fief électoral, n'ont accès ni à l'eau potable, ni à l'électricité" | |
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Vous revenez des vacances parlementaires, quelle signification vous y donnez ?
Honorable Jean-Claude Vuemba : C'est la grande manifestation de la Charte entre la population et son élu. Quand nous venons à Kinshasa pour les sessions, ordinaires et extraordinaires, nous laissons notre base à l'intérieur du pays. Quand nous y retournons, 4 ou 6 mois après, c'est pour vérifier si les choses ont bougé et nous nous rendons compte qu'il n'y a eu aucun changement. Je dirais plutôt que les choses régressent. Malheureusement, c'est devenu monnaie courante dans ce pays. Souvent, nous sommes même obligés d'aller au-delà de notre circonscription électorale, pour dire à la population ce que nous, les représentants du peuple, ce que nous avons proposé, ce qui reste à faire et ce dont le gouvernement doit nécessairement tenir compte. De son côté, la population nous montre la misère de son quotidien, elle nous dit ce qu'elle pense et nous fait part de ses attentes. Quel constat dressez-vous de vos récentes vacances ? JCV : Je dois vous dire la vérité… Dans le territoire de Kasangulu, ma circonscription, la population a les mêmes préoccupations depuis toujours. Non seulement la situation ne change pas, elle s'aggrave. Les gens vont jusqu'à nous demander à quoi sert finalement notre présence à l'Assemblée Nationale et si nous ne sommes pas seulement motivés par le pécule dont les députés et les sénateurs bénéficient. Vous avez passé combien de temps aux côtés de vos électeurs ? JCV : Un mois, tout juste. En réalité, je suis tous les jours avec mes électeurs. Je passe 250 jours sur les 365 de l'année dans mon territoire de Kasangulu. Même pendant la session, j'y passe souvent le week-end. Je me rends partout : à Luila, Kasangulu, Lukunga Mputu, N'Djili Brasserie… Mais c'est difficile de se rendre pour le moment à Lukunga Mputu, parce que le pont de Dingi-Dingi s'est effondré depuis le mois de juillet. Quelle initiative avez-vous prise ? JCV : J'en ai informé le ministre d'Etat chargé de l'Intérieur et de la Sécurité nationale. J'ai interrompu mes vacances pour aller voir le ministre des Infrastructures, Travaux publics et Reconstruction… Qu'est-ce qu'il vous a dit ? JCV : Il m'a promis qu'il allait dépêcher sur le lieu une équipe de l'Office des routes. Elle s'y est rendue ? JCV : Pas encore ! Pourtant, sans le pont, Dingi-Dingi est enclavé. De Dingi-Dingi à Mayinda, sur une distance de 75 Km, la route est impraticable. A Kisantu, le Président de la République m'avait promis qu'il allait faire réhabiliter cette route d'intérêt local. Mais, la population de Kasangulu constate avec amertume que cette route n'est pas retenue parmi les travaux de réhabilitation des infrastructures dans le cadre des Cinq chantiers de la République. Revenons à votre circonscription qui est Kasangulu… JCV : Encore faut-il pouvoir y accéder librement ! La police routière a multiplié les barrages, bien souvent à des fins inavouées aux résultats aux examens d'Etat. Est-ce que vous pouvez comprendre que le territoire de Kasangulu, qui est considéré depuis longtemps comme une des pépinières dans la formation scolaire, fasse 15% de réussites aux examens d'Etat ? J'y reviendrai. Il y a également la présence des militaires de la Garde républicaine qui squattent la prison centrale de Luzumu. Cela préoccupe la population et l'on se demande bien quelle cible pourrait être visée. Le Président de la République ? Mais, il n'y a aucune résidence, aucune concession, aucune ferme présidentielle à Luzumu. C'est une prison de haute sécurité, c'est normal qu'elle soit gardée par des éléments armés… JCV : En tout cas, pas par la Garde républicaine, car il n'y a plus de prisonniers depuis belle lurette et leur présence continue de perturber la quiétude des villageois et des habitants. Quels sont les autres problèmes avérés de Kasangulu ? JCV : La ville de Kinshasa voudrait installer une décharge publique dans le village de Limbunu qui se trouve à Kasangulu ! Souvenez-vous que j'ai chassé la MONUC comme une malpropre lorsqu'elle a voulu déverser des déchets toxiques à Kingatoko. J'ai dit personnellement au gouverneur de la ville de Kinshasa que Limbulu et ses environs sont des villages paisibles. Vouloir y ériger une décharge publique pour immondices, c'est permettre que des déchets toxiques, qui viendraient de partout (Amérique, Asie, Europe), trouvent une niche à Kasangulu. Si c'était le cas, nos enfants et nos femmes souffriraient de diverses maladies… Si le gouverneur Kimbuta veut bien avoir une décharge publique pour sa ville, il n'a qu'à aller voir du côté de la cité des pêcheurs de Kinkole ou du plateau des Batekes à l'Est de la ville de Kinshasa, où il y a beaucoup d'espaces verts. En tout cas, chez nous, nous ne l'accepterons jamais. Autre problème : environ 80% des habitants de Kasangulu n'ont pas accès à l'eau potable et à l'électricité. Pourtant, nous avons deux barrages hydroélectriques (Zongo et Nsanga). Par ailleurs, ce territoire n'a pas de morgue. L'ancien gouverneur, feu César Tsasa di Tumba, avait posé la première pierre de la construction d'une morgue à Kasangulu, mais le projet s'est arrêté là. On est obligé de se rendre, soit à Kinshasa, soit à Kisantu. Il y a aussi les routes qui sont en piteux état… Parmi les routes à moderniser par le gouvernorat, celle qui va de Kasangulu à Songololo, le village natal de ma mère, et celle de Vululu à Mawida. Et pour les travaux, on a remis dix brouettes, cinq pelles et 7 houes à la population. De qui se moque-t-on ? Un tracteur aurait suffi pour baliser la route ! Chez eux, au Bas-Fleuve et dans les Cataractes, ils ont envoyé plusieurs tracteurs. A propos de la décharge publique, il nous revient que les gouverneurs de Kinshasa et du Bas-Congo ont trouvé un compromis ? JCV : La population ne l'acceptera pas, croyez-moi ! Je vous jure qu'on viendra nous tuer pour ça. Depuis que vous êtes député national, quelles actions avez-vous déjà menées en faveur de vos électeurs ? JCV : Nous avons réhabilité les écoles et le centre de santé de Luila. Nous avons demandé et obtenu qu'une extension de l'ISTA soit installée à Kasangulu… Sans parler des actions en faveur des associations que nous montons ou encadrons. J'ai aussi organisé un colloque sur les échecs aux examens d'état et bien d'autres actions en faveur des entreprises. Je m'investis personnellement sur les dossiers relatifs à l'électricité, les routes et les télécommunications. L'électricité est la richesse potentielle de notre territoire et c'est elle qui amènera le développement et sortira de la misère ses habitants. A votre avis, pourquoi la situation dans l'arrière-pays est-elle pire qu'avant ? JCV : C'est simple, il y a la mauvaise gouvernance, tant au niveau de Kinshasa (gouvernement central) qu'au niveau du Bas-Congo (gouvernement provincial). Il y a une véritable incompétence dans la gestion de la population. Par exemple, Kasangulu ne bénéficie même pas de 10.000 dollars par an du péage sur la route nationale n°1. Où va tout cet argent ? D'ailleurs, je vais demander qu'un audit soit diligenté à ce sujet auprès du ministère de l'Intérieur et Décentralisation. Je reviens à l'enseignement. Les écoles et les internats de Kasangulu sont majoritairement (60%) fréquentés par les élèves venant de Kinshasa. Mais, les enseignants, eux, n'ont pas de prime, contrairement à ceux de Kinshasa. Mais la prime des enseignants est organisée et gérée par les écoles elles-mêmes ? JCV : Ce n'est pas normal que les uns la touchent et les autres pas. Et c'est pour cela que j'ai demandé à l'administrateur du territoire de recenser tous les élèves, leurs origines et leurs adresses. Ainsi, on saura qui vient étudier à Kasangulu. Faute de motivation, les enseignants désertent les écoles de Kasangulu, pour aller voir ailleurs… Où, par exemple ? JCV : Ils préfèrent partir à Kisantu, Mbanza-Ngungu ou carrément venir à Kinshasa… Pourtant, le ministre de l'EPSP, Maker Mwangu, pour lequel j'ai beaucoup de respect, m'a donné plus de 50 agréments d'écoles et a résolu le problème de mécanisation pour plus de 50 enseignants de Kasangulu. Ce n'est pas suffisant, nous devons aller plus loin. Et pour cela, les enseignants doivent avoir les mêmes avantages que leurs collègues de Kinshasa. Apparemment, vous en voulez à la ville de Kinshasa et à ses dirigeants ? JCV : Non ! Ce sont les faits, les problèmes qui se posent. Par exemple, les habitants de Kasangulu avaient une fâcheuse manie de fournir, à tout prix, à Kinshasa les braises et le bois de chauffage, sans songer au reboisement. Maintenant, Kasangulu commence à manquer d'arbres à même de protéger son écosystème. Et comme si cela ne suffisait pas, des malins venus de Kinshasa poussent la population à couper les bambous. Pour quoi faire ? JCV : C'est pour la fabrication des allumettes, des brochettes, et des cure-dents. A vous entendre parler, on dirait que vous prônez l'irrédentisme identitaire ? JCV : Je suis partisan de la liberté. Je me suis toujours battu contre le fédéralisme et j'ai demandé à la population congolaise de ne pas voter pour la Constitution ; parce que le fédéralisme était pointé dans la loi fondamentale. Heureusement, ils viennent de se rendre compte que les moyens font défaut pour le mettre en œuvre. L'année 2009 pointe à l'horizon, il faudra passer à 26 provinces. Où sont les moyens ? Déjà, ils n'arrivent pas à rétrocéder les 40%. Par rapport à l'identification des élèves, c'est dans le but d'assimiler Kasangulu à Kinshasa, en ce qui concerne la question épineuse de la motivation et la paie des enseignants. Quant aux fermes et aux concessions, nous voulons juste savoir combien de sociétés, d'ONG, etc. ont des propriétés foncières à Kasangulu. Laissez-moi vous dire que Kasangulu est le seul lieu dans ce pays qui a beaucoup vendu ses terres. Bien des grandes personnalités de ce pays y ont acheté des concessions et des fermes. C'est le seul endroit au pays, où les autochtones, c'est-à-dire les ayants droit ne savent plus cultiver. Aujourd'hui, allez voir ces concessions et ces fermes… Elles sont toutes ou presque à l'abandon. Et l'on interdit l'accès à ces espaces à nos femmes et à nos mères pour les travaux des champs. Comment vont-elles survivre ? C'est sérieux ? JCV : J'attends le nouvel administrateur du territoire pour que nous puissions tenir les états généraux sur ce problème des concessions et des fermes de Kasangulu. En même temps, je suis en contact avec une ONG finlandaise pour le reboisement de plus d'un million d'arbres à Kasangulu. Quel serait alors l'objectif de ces états généraux sur l'environnement ? JCV : Je suggère, par exemple, que les concessions et les fermes qui sont à l'abandon soient reprises par l'Etat, de sorte que nos mères, nos femmes et nos enfants puissent s'adonner à l'agriculture. Des gens occupent plus de 100 hectares, mais n'en exploitent qu'un seul… Pourquoi ne pas céder une partie à la population pour les travaux des champs ? Sans doute que l'aspect touristique, qui fait désormais défaut à Kasangulu, sera évoqué lors de ces assises ? JCV : Ce n'est pas du tout correct de dire que Kasangulu a perdu de son attrait touristique. Je vous dirai qu'il y a des hôtels en construction. Certes, la vitrine de Kasangulu a longtemps été l'hôtel « le Relais » du feu baron Manoka. Il avait été pillé. Mais, je vous citerai mon village Matanda qui est à la source des chutes de Zongo. C'est une source intarissable, du 1er janvier au 31 décembre. Vous avez aussi la chute de Luzumu, mais il faut que la route soit viable. Je viens d'y poser un pont, il y a 15 jours. Avec le retour des pluies, je ne sais pas combien de temps il va résister. Par ailleurs, je vous informe que des Congolais de France vont conduire une mission des Brésiliens à Kasangulu. Il est question de voir comment y faire la culture du tournesol. Vous savez que le tournesol amène beaucoup des choses. Bref, tout cela n'aura de sens que quand les infrastructures routières seront mises en place, en sachant que nous sommes exclus des Cinq chantiers de la République et du programme du gouvernorat provincial. Vous dites si bien « Chantiers de la République », et pourquoi dites-vous que vous en êtes exclus ? JCV : Citez-moi un seul chantier qui est exécuté à Kasangulu ? Avez-vous pendant la campagne électorale fait des promesses à la population pour vous faire élire ? JCV : La population de Kasangulu m'a élu en sachant que le rôle d'un député national est de sauvegarder et de préserver ses intérêts. Le député national n'a pas d'argent pour jeter un pont, construire des écoles ou des hôpitaux… Le député national fait plutôt pression sur le gouvernement pour qu'il s'assume : construire des routes, des hôpitaux, des morgues, etc., pour sa population. Personnellement, je n'ai jamais promis à la population de construire des routes ou des édifices publics. Toutes les actions sociales que j'entreprends à Kasangulu sont réalisées grâce à mes propres moyens. J'avais promis une école supérieure, l'ISTA est là. J'avais promis une station de radio et de télévision communautaire, KVK est là. C'est votre propriété ? JCV : Non. C'est une chaîne qui appartient à une ONG. C'est elle qui a fait des démarches auprès du ministre de la Communication et des Médias pour les autorisations nécessaires. Je me suis contenté de les soutenir . L'actualité dans le pays reste encore dominée par la démission du Premier ministre, Antoine Gizenga Fundji. Quelle réflexion préliminaire vous inspire-t-elle ? JCV : Je suis un combattant de la liberté, de la démocratie et des droits de l'homme. C'est pour vous dire que je respecte le Premier ministre, mais je trouve que sa démission tardive n'est pas sincère. Pourquoi dites-vous cela ? JCV : Le motif qu'il a évoqué, celui du poids de l'âge me renvoie à l'histoire de ce pays. En 1960, le président Joseph Kasa-Vubu (Abako) limogeait le vice-Premier ministre Antoine Gizenga ( Psa), le même, pour incompétence. Et 47 ans après, ce n'est pas le Président de la République, mais plutôt le peuple congolais qui a demandé à Gizenga d'arrêter avec la mauvaise gouvernance, la corruption, l'insécurité… Et aussi avec le musellement de la presse, les arrestations arbitraires, cas de Gabriel Mokia (MDCO) et du pasteur Kuthino Fernando, qui sont en prison parce qu'ils ont osé dire le contraire de ce que le pouvoir pense. Et que dire de l'exil forcé du pasteur Théodore Ngoy député provincial MLC du Katanga ? Vous voulez dire que Gizenga est parti sous la pression populaire ? JCV : Nous disons que la population a eu raison de le faire partir. Quand Gizenga fait allusion à son âge, mais de qui veut-il se moquer ? Il y a une année, tout juste, nous lui avons dit à l'Assemblée nationale que son âge méritait la retraite. Il a répondu qu « il était prêt à servir le Congo pour 5 ans ». D'ailleurs, dit-il, le roi Léopold II ne s'était jamais déplacé pour diriger le Congo. Nous avions compris que c'était une façon de masquer son immobilisme et se comparant à Léopold II, il en dit long sur sa gouvernance ! ! Et lorsque l'on insinue que le Président de la République n'avait plus confiance en son Premier ministre, on ment au peuple. Au contraire, le Président lui a régulièrement manifesté sa confiance... Au PALU, par contre, on soutient que le Premier ministre n'avait plus confiance en certains ministres et certains collaborateurs du chef de l'Etat ? JCV : C'est un discours entre copains… Quand Godefroid Mayobo dénonce le détournement de plus d'1 milliard de dollars, de 2006 à ce jour, de quoi payer 270.000 fonctionnaires pendant deux ans à raison de 200 dollars par mois, qui a été interpellé ou convoqué devant la justice ? Ils se fichent pas mal du peuple ! Souvenez-vous du procès Likopa ! Le PALU cherche à retrouver la place qui était la sienne dans l'opposition. Mais après sa collaboration avec les « barons pillards » congolais, il va avoir du mal à justifier sa gouvernance. Certains ministres ne cessaient de critiquer en privé le Premier ministre pour son immobilisme. Est-ce que vous pouvez comprendre qu'en près de deux ans au pouvoir, Gizenga recevait très rarement ses ministres et jamais plus de deux ou trois minutes à la fois… Qu'il n'a jamais fini les réunions du Conseil des ministres et que c'est Godefroid Mayobo qui les poursuivaient. C'est tout simplement pour vous dire que le Congo n'a jamais été autant pillé, jamais été autant en insécurité que sous le gouvernement de Gizenga. Elle est où, la sécurité qu'il nous a promise à l'Est ? Aujourd'hui, je lui souhaite une très bonne retraite et je me réjouis de son départ. Il savait que son passage au Parlement allait être très dur et il a préféré démissionner avant de subir cette épreuve. Le PALU prévient que si on lui arrachait la primature, il quitterait les institutions. Ne craignez-vous un déséquilibre dans le rapport des forces à l'Assemblée nationale ? JCV : Le PALU, qui vient magistralement de démontrer son inutilité dans la majorité, a 33 députés, cela va changer quoi ? Est-ce que vous vous êtes réunis à l'opposition pour arrêter une stratégie commune à la suite de la démission de Gizenga ? JCV : Le problème n'est pas là. L'opposition, qui s'organise, doit d'abord construire une plate-forme commune en vue de reconstruire le pays, et nous y travaillons. Que pensez-vous de la déclaration incendiaire du général rebelle Laurent Nkunda-Batware-Mihigo sur son option militaire finale jusqu'à Kinshasa, la capitale de la RD Congo ? JCV : Ce qui passe à l'Est du Congo me glace dans le dos. l'Est de notre pays est toujours en guerre, « La Guerre du Kivu » comme on l'appelle maintenant. Si la République Démocratique du Congo agissait comme un Etat souverain, le gouvernement aurait pris la seule mesure qui s'impose : interdire le CNDP et renouveler le mandat d'arrêt contre le chef rebelle Laurent NKUNDABATWARE. Il est temps de constater que le programme AMANI ne marche pas et que la pacification du Congo nécessite le courage politique qui a fait défaut jusqu'à présent. Comme le dit si bien le Président de la République : « Le Rwanda n'est pas innocent dans la reprise des combats au Nord-Kivu »… Je rappelle que le groupe d'experts des Nations Unies a formellement reconnu la participation active du Rwanda dans un vaste complot régional, qui a pour seul objectif de soustraire des matières précieuses et semi-précieuse de la RDC. Et Paul Kagame a déclaré récemment que si Laurent NKUNDA venait à disparaître, il y en aurait immédiatement un autre qui prendrait sa place. Ca me rappelle deux ans en arrière les propos prophétiques du Président Etienne Tshisekedi wa Mulumba, leader de l'Udps, qui lui a valu une relégation à Kabeya Kamuanga dans son Grand Kasaï natal : « Je demande à mon frère Laurent-Désiré Kabila d'exiger de ses amis burundais, ougandais et rwandais leurs factures de guerre pour avoir aidé les Congolais à renverser le régime du Maréchal Mobutu Sese Seko ». Il est plus que temps pour la RD Congo d'entamer des négociations sans sujet tabou avec ses trois voisins de la région des Grands lacs pour la reprise des relations diplomatiques, afin de mettre fin aux pires atrocités que vivent nos frères et sœurs kivutiens. Tant que les Fardc ainsi que les services de renseignements ne seront guère assez suffisamment formés, c'est-à-dire aguerris, il nous sera vraiment difficile de pacifier l'Est du pays sans imposer un rapport équilibré des forces. Surtout que la Monuc refuse catégoriquement d'appliquer le chapitre 7 des statuts de l'ONU pour rétablir la paix. Alors, il est plus que temps qu'elle plie ses armes et bagages pour aller camper ailleurs. Comme ce fut le cas en Angola avec la série des UNAVEM… Etes-vous prêts à entrer dans un gouvernement d'ouverture, comme d'aucuns le préconisent ? JCV : En ce qui concerne l'ODR, mon groupe parlementaire, la réponse est non. On ne peut pas aller dans un gouvernement d'union nationale sans programme commun. L'AMP, le PALU et l'UDEMO doivent travailler et achever leur mandat qui court jusqu'en 2011. Quant à nous, nous attendons l'alternance. Nous ne pouvons pas entrer dans un gouvernement d'extrémistes qui bradent les richesses du Congo en échange des miettes que laissent les pilleurs étrangers. Autre question d'actualité, c'est la désignation du porte-parole de l'opposition. Ca fait polémique ? JCV : Nous sommes 140 députés à vouloir que le chairman du MLC Jean Pierre Bemba Gombo soit le porte-parole de l'opposition. Mort ou vivant, en prison ou en liberté, jusqu'en 2011. Que gagnerez-vous que Bemba soit le leader de l'opposition, alors qu'il risque de faire la prison, puisque poursuivi par la Cour pénale internationale ? JCV : Nelson Mandela est resté en prison pendant 27 ans, mais il était toujours le président de l'ANC. Jean Pierre Bemba se trouve injustement à La Haye. C'est Olivier Kamitatu, lorsqu'il était secrétaire général du MLC avant de retourner sa veste pour l'AMP, qui a négocié avec le président centrafricain l'envoi des éléments du MLC à Bangui, alors que Jean Pierre Bemba se trouvait en Afrique du Sud. Voilà la précision pour l'histoire récente. Voulez-vous dire qu'Olivier Kamitatu est aussi impliqué dans cette affaire ? JCV : Le porte-parole de la CPI a dit qu'il y a des ministres, des personnalités congolaises qui sont impliqués dans cette affaire et qu'ils devront répondre de leurs actes. Mais les autres, se fondant sur les textes, contestent le choix porté d'office sur Bemba ? JCV : Le président Gilbert Kiakwama, des Chrétiens-Démocrates, nous a envoyé une lettre aux fins des discussions. Dans son groupe, la moitié des députés veulent un autre candidat, alors que tous les 110 députés et sénateurs du MLC, tous les députés et sénateurs de l'ODR ont déjà porté leur choix sur Jean Pierre Bemba. De son côté, le RCD a mis sur la table un autre règlement intérieur. Gabriel Mokia et Richard Ezuluwa ont aussi le leur… Et donc le consensus est difficile à trouver ? JCV : Comme nous ne nous entendons pas, c'est clair que nous n'allons jouer le jeu de la démocratie interne. C'est-à-dire ? JCV : Le vote. Quand est-ce que ce vote intervient ? JCV : Nous allons nous concerter dans quelques jours avec les autres amis qui ne sont pas aux institutions. Et nous allons écrire officiellement aux Présidents de deux Chambres… Pensez-vous que Bemba sera libéré ? JCV : Jean Pierre Bemba sera parmi nous avant 2011. Il va être libéré. Et, en 2011, il aura beaucoup de chances pour devenir Président de la République… C'est un peu hâtif comme pronostic ? JCV : S'il y a eu 33 candidats, en 2006, il y en aura au moins 64, en 2011, dont 4 de l'opposition et 60 de la majorité. C'est connu. Il y a deux affaires politico-judiciaires dans lesquelles vous êtes impliqué personnellement. Il s'agit de l'affaire du riz souillé de Congo Futur et du procès des membres de BDK. Quels commentaires faites-vous ? JCV : Ne faisons pas de l'amalgame dans l'affaire des adeptes de Bundu dia Kongo. Lorsque des membres de BDK enfreignent la loi, faut-il y voir l'ombre de Ne Mwanda Nsemi ? Si un catholique a des démêlés, doit-on interpeller Mgr Laurent Monsengwo ou le pape Benoît XVI ? Le rapport de la MONUC est clair à ce sujet : il y a eu tueries, plus de 100 morts. Aujourd'hui, la CPI est saisie de la plainte de Ne Mwanda Nsemi… On a transféré à la prison centrale de Makala 27 adeptes de BDK, malades et affamés. J'ai conduit la commission parlementaire d'enquête sur cette affaire, je vous renvoie à notre rapport. Pourquoi soutenez-vous Ne Mwanda Nsemi ? JCV : Je suis un combattant de la liberté, de la démocratie, de la résistance et des droits de l'homme. Je ne suis pas un tricheur et la population sait que je défends ce qui est bien et juste. Lisez notre rapport et vous serez surpris. Il n'y a pas de complaisance. J'ai dénoncé certains comportements des membres de BDK, qui, après le dépôt de notre rapport, pourra faire l'objet d'une saisine de la justice. Vous voulez dire qu'ils doivent être poursuivis par la justice ? JCV : Je vais vous faire un aveu : pendant 15 jours, l'Honorable Ne Mwanda Nsemi a été très froid envers moi, après avoir pris connaissance de ce rapport. Qu'est-ce qu'il vous a reproché ? JCV : Il a dit que je suis allé trop loin en incriminant des membres de BDK… Mais je suis un légaliste et je sais ce que j'ai vu et entendu. Donc, vous avez confirmé l'existence des champs de chanvre et des centres d'entraînement, par exemple ? JCV : J'ai conduit la délégation parlementaire à Matadi, et le gouverneur du Bas- Congo nous a proposés des membres de l 'administration provinciale, entre autres des fonctionnaires, des soldats et des policiers. Au total, 12 personnes. Avec eux, nous avons enquêté : pas de champ de chanvre. Nous sommes dans un pays où tout peut se dire. Ici même, on avait jadis traité Etienne Tshisekedi wa Mulumba de fou… Quand on veut se débarrasser de son chien, on l'accuse de la rage. Mais vous n'allez pas nier le discours, soi-disant haineux et xénophobe, du député Zacharie Badiengisa alias « Ne Muanda Nsemi ? » JCV : Je ne peux pas accepter ce genre des propos. C'est un faux prétexte de dire que certaines personnes ont été instrumentalisées. Le message de BDK est clair : il est de bon ton que les entreprises, comme OCC, Ogefrem, SNEL, REGIDESO, Ofida et Onatra, si elles veulent embaucher pour leurs services dans le Bas-Congo, accordent la priorité (90%) aux résidents du Bas-Congo, aux originaires comme aux non originaires sans discrimination. Retenez bien la nuance ! S'il n'y a pas localement l'expertise recherchée, alors ces entreprises peuvent recourir à une expertise extérieure, hors province. Ils ne disent pas qu'il faut prendre un Mukongo, mais un résident dans le Bas-Congo. D'ailleurs, on oublie que le Bas-Congo est la seule province qui ait dans son assemblée provinciale des députés (deux) non originaires. L'un est du Bandundu et l'autre du Katanga. Où se trouve la xénophobie ? Ma femme et mon assistant parlementaire sont du Kasaï. C'est pour cela que je vous dis que cette affaire a été politisée à outrance. Et l'affaire du riz souillé. On dit qu'un certain lobby vous utilise contre Congo Futur ? JCV : Je ne travaille que pour un seul lobby : la population ! La vérité est que les gens m'appellent de partout pour me faire rapport ou pour me transmettre des documents importants. Ce riz est venu de la Chine à bord du navire Slovenia. L'expertise de l'OCC a démontré que la cargaison était avariée. Le laboratoire vétérinaire de Kinshasa a été saisi. Sur les quatre échantillons, les résultats de deux échantillons ont été identiques à ceux du rapport de l'OCC. Congo Futur a envoyé ses propres techniciens à Paris chez Veritas pour le même travail. Ce riz a été récolté en 2000-2001. Avant qu'un produit vivrier entre dans notre pays, l'OCC veille aux dates. Le minimum est un an et le maximum, c'est 3 ans. Or, ce riz est entré 5-6 ans plus tard. Même si nous mangeons la merde dans ce pays, il y des limites ! Voilà pourquoi j'ai initié une motion. Il a été décidé que ce riz serait détruit, que la justice serait saisie, mais des personnalités politiques font toujours pression sur l'OCC pour que la marchandise soit écoulée sur le marché… C'est vous dire que personne ne m'utilise ! Congo Futur voulait dissimuler le rapport d'analyse du laboratoire vétérinaire de Kinshasa et ils n'ont pas compris comment j'en suis entré en possession. C'est vous dire que je n'ai jamais soutenu la corruption. Il y avait également Ledya et Kansebu dans ce secteur d'activité, mais ils ont disparu face aux pratiques anticoncurrentielles. Voilà ce contre quoi je me bats. A quoi attribuez-vous le fait que les recommandations et les résolutions de l'Assemblée nationale ne soient pas suivies d'effet ? JCV : En premier lieu, au fait que la démocratie ne fonctionne pas. Derrière l'immobilisme du gouvernement et de la megestion de la chose publique, il y a les pratiques scandaleuses qui bloquent tout. J'entends par-là le gouvernement parallèle qui détient les véritables clés du pouvoir et dont le seul but est de s'enrichir. Ces gens-là sont prêts à tout pour conserver leurréseau d'élite. Ilsn'ont aucune considérationpourlavie humaine. Seuls, l'argent et le pouvoir les intéressent. Derrière ce réseau congolais, les réseaux du grand banditisme international se livrent une guerre sans merci sur notre dos. La mafia ukrainienne, les clans libanais, les réseaux néo-sionistes appuyés par l'administration américaine, et surtout, le réseau d'élite de l'ancien colon belge. Vous voyez que notre pays n'est pas sorti d'affaire. Voilà pourquoi la corruption prospère ! Lorsque les Députés ne peuvent pas mettre leur nez dans les affaires publiques, il n'y a pas de démocratie. Pour faire bouger les choses, il faudrait une majorité des parlementaires pour réclamer des nouveaux pouvoirs à l'Assemblée Nationale. Nous sommes les représentants élus du peuple et, à ce titre, nous devrions être en première ligne de la démocratie, mais la route est longue vers la liberté et l'autodétermination... Heureusement, quelques membres de la majorité avaient compris que Gizenga devait partir. J'ai suivi d'ailleurs l'Honorable Tryphon Kin-kiey à Masimanimba, qui déclarait que, cette fois-ci, l'Assemblée nationale allait désormais jouer son rôle. Ce n'est pas parce que l'on fait partie de l'AMP que l'on doit laisser mourir le pays. Quel est le profil pour le prochain Premier ministre ? JCV : Il faudrait un homme de rupture avec les 47 années de megestion, un homme fort qui ne laisserait pas faire le Président de la République et son entourage, un bon gestionnaire qui a fait ses preuves dans les entreprises congolaises ou ailleurs, un démocrate, une personne qui soit prête à bouger et à se rendre dans n'importe quelle commune du Congo. Quelqu'un qui nous expliquerait, par exemple, pourquoi l'OFIDA a été mis sous la tutelle d'une société fantôme immatriculée dans le Delaware - un paradis fiscal aux Etats-Unis. J'ai vérifié, les deux principaux acteurs de CTC sont parfaitement compétents en matière de douane et de collecte d'impôts, mais il y a anguille sous roche, peut-être même tout un nid de crocodiles…Voilà pourquoi il nous faut rompre avec le passé. Malheureusement, j'ai bien peur que ce ne soit qu'un vœu pieu. Et les nominations dans la territoriale ? JCV : Le Chef de l'Etat peut le faire dans ses prérogatives, certes. Mais le moment choisi est malsain. C'est dans les habitudes politiciennes de vouloir verrouiller tous les districts, mairies et territoires du Congo au profit d'un seul mouvement, l'AMP. I l est clair dans cette affaire que le PPRD veut tout contrôler.
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