Kasangulu dans le Bas-Congo court un grave danger d’insécurité alimentaire
Le Soft International n°1065 du vendredi 10 Septembre 2010
Kasangulu dans le Bas-Congo court un grave danger d’insécurité alimentaire
L’insécurité alimentaire est aux portes de Kasangulu. Pour cultiver les champs, les paysans de Kasangulu, un territoire du Bas-Congo, à l’entrée de Kinshasa, parcourent des dizaines de kilomètres. La situation devient inquiétante au point où les ONG tirent la sonnette d’alarme.
Dans les 5 prochaines années, si rien n’est fait, Kasangulu connaitra une pénurie alimentaire aiguë. C’est le constat que font les ONG dons World Vision. Le Député d’Opposition, Jean Claude Vuemba Luzamba, élu de Kasangulu en est conscient. Au « Soft », il fait part de son initiative d’organisation, en Octobre prochain, d’une table ronde élargie qui réunirait l’Etat, les Chefs de terre, la population et les fermiers en vue de débattre de la question. Jean Claude Vuemba a une idée : pour prévenir l’insécurité alimentaire qui guette la population de Kasangulu, il demande aux fermiers de laisser un espace de terre aux paysans.
La situation est très critique, reconnait le président national du MPCR.
COMME AU MOYEN ÂGE
En effet, les paysans de Kasangulu et des villages environnants parcourent désormais des dizaines de kilomètres à la recherche des espaces cultivables. « C’est grave, fait savoir Jean Claude Vuemba. La situation date de l’année 2005. Elle est due à une seule chose : la vente des concessions et des terres aux fermiers par les chefs coutumiers ». Ces derniers qui sont reconnus comme propriétaires des terres, les vendent systématiquement aux particuliers et aux fermiers. Les acquéreurs des concessions interdisent aux autochtones d’y faire des activités d’agriculture. Conséquence : la population s’adonne au métayage qui ne profite qu’aux propriétaires terriens. C’est eux qui définissent les clauses. Dans la plupart des cas, ils ne laissent que le tiers de la production aux paysans. Sinon ces derniers ne reçoivent qu’une petite somme d’argent, fruit de la vente des produits vivriers. Les ONG constatent que cette pratique de métayage appauvrit davantage la population de Kasangulu.
Sans compter la malnutrition et ses corollaires, 90% des dossiers devant le Tripaix de Kasangulu se rapportent aux conflits de terre. Des opportunistes s’improvisent chefs des terres et les vendent sans scrupules. Mettent ainsi la population dans une grande insécurité : bagarres, morts d’hommes, razzia des villages, etc. Le Député Vuemba se plaint que le phénomène ait plus d’ampleur dans le territoire de Kasangulu que partout ailleurs dans le Bas Congo. « De Kisantu jusqu’à Moanda en passant par Mbanza-Ngungu, Boma, Luozin Seke Banza, Tshela, etc., la terre est louée et non vendue aux particuliers », râle-t-il. Par exemple, à Kingatoko, où l’on produisait jadis une grande quantité de « Mpondu » et de manioc, il y a aujourd’hui au moins trois entreprises familiales qui ont acquis toutes les terres auprès des chefs coutumiers, s’indigne-t-il.
Les femmes sont contraintes de parcourir 25 à 50Km. Elles vont jusqu’à Nkalama et Nsanda pour les travaux des champs. Parfois, elles s’absentent 2 ou 3 jours du toit conjugal, laissant maris et enfants à la merci de la dépravation.
« C’est une situation que nous ne pouvons pas accepter. Malheureusement, nous sommes dans un pays où la terre est reconnue aux chefs coutumiers et aux chefs de terres. Celui qui vend son bien est libre. Nous ne pouvons pas les en empêcher », déplore Vuemba. Comme lui, des ONG fustigent ces ventes des terres qui ne tiennent pas compte des paysans et surtout des générations futures.
« Les chefs coutumiers, propriétaires des terres, sons mus par le seul souci du lucre, du profit personnel. Et si demain, il n’y a plus de terres à vendre, que feront-ils ? », pose un activiste de la société civile. Même les cimetières sont pris d’assaut par les fermiers.
« Les gens ne savent plus où enterrer les leurs dans leurs propres villages », fait remarquer Vuemba. Qui préconise que les fermiers laissent 15 à 20% d leurs espaces aux villageois pour faire l’agriculture et l’agropastorale.
Depuis 2009, 80% de « Mpondu » et de manioc consommés à Kasangulu proviennent de la province de Bandundu. Pourtant, Kasangulu, proche de Kinshasa, a toujours été son premier grenier. Jean Claude Vuemba indique que cette situation appelle une motion parlementaire.
PATIENCE KIMVULA