Clément Kanku : « il y a beaucoup d’irréalisme, beaucoup d’utopies, bref c’est la pire distraction »
La Prospérité n°1950 du 13 Août 2010
Calendrier électoral de la CEI
Clément Kanku : « il y a beaucoup d’irréalisme, beaucoup d’utopies, bref c’est la pire distraction »
Après la publication du calendrier technique sur le processus électoral par l’abbé Malumalu et après tout le tollé qui s’en est suivi, votre journal a fait parler un Député national. Mais pas n’importe lequel. Clément Kanku pour ne pas le citer, celui là même qui s’est lancé corps et âme pour relancer l’Union pour la Nation, à l’absence de son ami et compagnon, Jean-Pierre Bemba. Il passe, ici, au peigne fin, la situation du moment, les élections annoncées et sa vision du devenir de la RD Congo. La Prospérité : Honorable, vous avez tout dernièrement rejeté le calendrier technique rendu public par l’abbé Malumalu. Pourquoi avez-vous préféré vous attaquer à l’individu au lieu de viser l’institution ? Clément Kanku : Je vous rappelle déjà que cette structure n’existe plus et bien avant qu’il existe, les gens avaient déjà dénoncé la gestion de l’abbé Apollinaire et dans la plupart de leurs déclarations, les agents de la CEI l’ont dénoncé à maintes reprises. Aujourd’hui, il se présente avec un de ses amis pour rendre public le calendrier alors que les autres membres du bureau n’étaient pas représentés. Nous disons seulement que c’est une initiative privée avec un de ses amis. Donc à ce niveau là nous ne pouvons que déplorer le gâchis. La Pros : Lorsque vous mettez en cause ce calendrier ne pensez vous pas que vous allez causer un retard par rapport au délai constitutionnel pour l’organisation des élections ? C. K : Non, non, non, nous ne causons pas de retard. Je crois que si le gouvernement, les institutions de la République veulent aller vite même dans une semaine nous pouvons avoir ce que nous sommes entrain de chercher. Je donne un exemple : il suffit de convoquer une session extraordinaire et en moins d’une semaine nous avons la CENI. Nous allons demander à ce que les choses se fassent très rapidement. S’il faut aller en session extraordinaire, on devra bien la convoquer. S’il faut attendre la fin du mois, on attendra. Je pense pas que ça aura une incidence sur les élections en elles-mêmes, c’est tout simplement une question de volonté politique. Ça fait 5 ans qu’on n’a pas pu organiser les élections municipales et urbaines, tout simplement parce qu’il n’y a pas eu de volonté politique. Si l’on veut s’y mettre, les choses vont se faire dans l’ordre, et nous allons respecter le délai constitutionnel. La Pros : Ne pensez-vous pas qu’il y a du réalisme dans ce calendrier ? C. K. : Il y a plutôt beaucoup d’irréalisme, beaucoup d’utopie, bref c’est la pire distraction. La Pros : Les élections approchent déjà. Comment l’opposition s’organise-t-elle ? A- t-elle déjà un Porte- parole ? C. K. : Ce qui est plus important dans les élections ce n’est pas le porte-parole, c’est le cadre de concertation, ce qui va nous amener à avoir un projet commun. Et, là vous le voyez au sein de l’Union pour la Nation, qui est une plateforme plurielle avec l’opposition parlementaire et extra parlementaire. La preuve, nous travaillons en très bonne intelligence, nous nous convenons très bien et nous voulons étendre cette coopération à d’autres membres de l’opposition, nous sommes confiants parce que les signaux que nous avons en face de part et d’autre sont rassurants. Nous pensons que nous irons dans la bonne direction. La Pros : Où en êtes vous avec la problématique de la candidature unique au sein de l’opposition ? C. K. : Vous avez vu que les élections passées il y a eu une candidature unique à la fin, au 2ème tour. Mais nous pensons que cela ne va pas poser beaucoup de problème parce que nous devons d’abord laisser les gens exprimer leurs ambitions. Nous sommes une opposition plurielle et en temps opportun les gens se mettront autour d’une table pour une sélection naturelle, c\'est-à-dire les gens vont s’éliminer naturellement par rapport au poids politique de ce qu’ils représentent sur le terrain. Pour le moment nous n’avons pas intérêt à étouffer les gens, il faut qu’ils s’expriment librement. En temps opportun, nous allons tiré toutes les conséquences et je crois que les membres de l’opposition sont suffisamment responsables pour ne pas aller dans une démarche suicidaire mais plutôt salutaire qui pourra sauver toute l’opposition et surtout répondre aux aspirations de la population qui attend de nous que nous puissions proposer une alternative sérieuse et crédible. Et tout ça nous devons absolument nous surpasser, aller au delà de nos petites aspirations personnelles. La Pros : Dernièrement l’Honorable Vuemba avait pris l’initiative de réunir l’opposition avec l’objectif de l’élaboration d’un programme alternatif commun. Les autres disent qu’ils n’ont pas le droit d’être méprisés à cette rencontre. Qu’en pensez-vous ? C. K. : La volonté de Jean-Claude Vuemba n’était pas d’exclure quelques uns. Ceux qui sont venus ont approuvé les recommandations adoptées. Les autres n’ont pas eu le temps matériel de faire le déplacement. Il a pris quelques membres de l’opposition. 4 partis politiques de l’opposition étaient présents, nous saluons l’initiative, nous même. Vous avez vu aujourd’hui, nous avons une trentaine des parties politiques sans parler des personnalités même des associations qui se reconnaissent proches de l’opposition. Je crois que quand un membre de l’opposition prend une initiative qui tente à unir les membres de l’opposition, nous ne pouvons que saluer. Nous disons qu’il est plus que grand temps qu’on puisse se mettre ensemble pour s’organiser, afin de trouver un programme commun de l’opposition et cela ne peut se faire que si on se met d’accord sur les fondamentaux. Et, Jean-Claude Vuemba c’est quelqu’un avec qui nous sommes en bon terme et nous voyons les choses dans la même direction, même si aujourd’hui les options levées ne soient pas les mêmes mais nous avons la même préoccupation : avoir une opposition organisée, structurée et surtout qui va faire poids à l’AMP demain. La Pros : Le Gouvernement Fantôme que vous avez mis en place n’est donc pas la même initiative que Vuemba ? Qu’est ce qui vous différencie fondamentalement dans l’approche ? C. K. : Ce n’est pas la même initiative parce que le gouvernement fantôme c’est l’émanation d’une coalition politique qui existe depuis 2006 et ce n’est que l’expression de la mise en pratique de notre programme commun de cette coalition qui est traduit à travers ce gouvernement fantôme qui est l’exécutif de notre coalition. A ce que je sache, l’initiative de Vuemba était une initiative ponctuelle. Il a appelé quelque gens, ils ont discuté alors nous nous réunissons régulièrement. Nous sommes en fait l’équivalent d’un gouvernement officiel sauf que nous ne sommes pas officiel mais nous nous réunissons avec un canevas de travail et des objectifs bien définis. Nous sommes structurés exactement comme un gouvernement d’Etat, nous ne posons pas des actes d’Etat mais nous posons des actions concrètes par rapport à l’actualité, par rapport à ce que la population vit au quotidien. Nous nous disons que nous voulons du ponctuel, nous voulons des choses durables, c\'est-à-dire nous voulons engager l’opposition dans des relations durables. Avoir des fondements durables, pas de feu d’artifice. Vous avez vu après l’organisation de cette manifestation il y a eu des partis politiques qui étaient à l’intérieur, qui se sont opposés à ça. Des réactions négatives. L’initiative était bonne, probablement la manière n’était pas adaptée. Au moins il a le mérite d’avoir tenté quelque chose à son niveau. La Pros : Le pays a atteint le point d’achèvement, la voie est ouverte donc au développement ? Quel impact cela peut avoir sur la population ? C. K. : Vous savez pendant longtemps on a voulu entretenir la population en lui faisant croire que en atteignant le point d’achèvement la population va vivre les merveilles. Ceux qui ont véhiculé ces mensonges, cette propagande, ils ont vite déchanté à la fin pour finalement accepter que ce point d’achèvement ce n’est qu’un processus. Qui n’a pas d’ailleurs commencé qu’avec ce gouvernement mais d’autres aussi même dans le temps de Mobutu, ceci a été aussi lancé. Ce qu’a trouvé ce gouvernement actuel ne va résoudre tous les problèmes des Congolais. Ce qui va résoudre le problème des Congolais ça sera la volonté de ces dirigeants. Appliquer de bonne politique qui va aller dans le sens de répondre aux attentes et aux aspirations et aux préoccupations de la population. Mais ce ne sont pas le principe édité par la Banque Mondiale. Ceux qui veulent nous faire croire c’est plutôt, la volonté du gouvernement de se lancer dans la bonne gouvernance. Même les économies qu’ils ont fait, les fonds qui étaient censé de servir dans la dette, devront être injectés dans le secteur le plus pauvre et pour ça, il faut la bonne gouvernance, sinon, ça servira à quoi d’économiser de l’argent pour le dilapider après. Comme on a fait le 30 juin en dépensant inutilement 300 millions de dollars pour les festivités du cinquantenaire alors que la population aujourd’hui retombe dans les mêmes problèmes, mêmes préoccupations sur le plan de la santé. Avec des hôpitaux qui sont encore dans un état chaotique, éducation encore pire, les infrastructures, à part quelque kilomètres qu’on est entrain de montrer sous forme de propagande. Après le 30 juin la population se rend compte que la situation s’est empirée, les gens ne sont pas payés, ni des emplois créés. Après le point d’achèvement, le gouvernement devait s’engager dans la bonne gouvernance, une politique réaliste, objective, responsable qui pourrait l’amené à sortir du gouffre mais ce n’est pas dans la propagande et les fantaisies que nous vivons. Nous sommes conscients de sortir des chantiers battus mais il nous faut plutôt une politique volontariste qui pourra sortir ce pays de la situation dans laquelle elle est plongée depuis les années. La Pros : Vos collègues crient à l’insécurité et au non respect des immunités parlementaires. Quel est votre avis ? C. K. : Les immunités parlementaires, nous l’avons dit et avons fait des déclarations, d’ailleurs j’étais le premier à avoir fait un communiqué. Ne pas reconnaître, ne pas respecter les immunités parlementaires c’est de ne pas reconnaître l’Institution Assemblée Nationale et tous simplement le Sénat. Donc, je crois que c’est un fâcheux précédent et nous espérons qu’il y aura une réaction de la part de ceux qui sont aux affaires pour que cela ne puisse plus arriver. C’est tous simplement l’impunité dont on parle. Quand quelqu’un ne veut pas respecter la constitution, ne veux pas reconnaître ce qui a été accepté par tous et promulgué par le Chef de l’Etat, cette personne se met en marge de la loi et cette personne doit être punie. En principe la tolérance Zéro devait s’appliquer dans ce genre de comportement au lieu de se perdre. Finalement la tolérance Zéro n’aura pas de contenu. Tous simplement des artifices. Je crois que les immunités parlementaires aussi bien de la Majorité que de l’Opposition ne peuvent souffrir d’aucune violation. Tous simplement en violant ces critères, on viole les fondamentaux, c’est adire la Constitution qui nous régit. Quant on touche à ça qu’est-ce qui nous reste en encore ? La Pros : Avez-vous un mot à dire sur l’arrestation de l’Honorable Munkokole qui, jusqu\'à ce jour, se trouve toujours en résidence surveillée ? C. NK. : L’arrestation de Munkokole, on ne le dira jamais assez c’est une arrestation malheureusement politique. Munkokole, on a voulu le juger en flagrance rapidement sur une histoire de véhicule volé. Alors que nous sommes dans un cas où un activiste des droits de l’homme avec son chauffeur disparu dans les conditions que vous connaissez, ça, on ne trouve pas de flagrance alors qu’il y a des gens qui sont passés aux aveux, qui sont aujourd’hui incarcérés. Ça, on ne trouve pas de flagrance. Nous disons que malheureusement la justice est politisée, instrumentalisée à souhait par ce qu’ils sont aux affaires. Alors que nous demandons une enquête indépendante pour que le gouvernement congolais impliqué dans cette affaire à travers la Police nationale congolaise de ce meurtre ne vienne rien perturber. La pros : Votre mot de la fin C. K. : En bref, nous disons que l’immunité parlementaire doit être respectée pour ne pas mettre en péril la démocratie que nous avons toujours cherchée depuis le dialogue inter congolais. Propos recueillis par Nicole Lidimbo
Philomène Mwaluke